lundi 23 février 2009

Soroche

Nous sommes arrives a La Paz entre deux averses. Quel spectacle impressionnant que cette ville de brique immense construite dans une cuvette ou les plus riches vivent au fond et les plus pauvres sur les hauteurs, la ou il fait encore plus froid. Nous sommes a 3660 m d'altitude, bien acclimates. La pluie devale les rues en pente raide et les centaines de minibus Dodge colores crachent un epais nuage bleu dans la montee. Jerome nous fait une allergie a la pollution, vite il veut respirer l'air pur des cimes de la Cordillera Real.

Apres deux jours a la Paz, nous partons a l'assaut du Huayna Potosi, 6088 m, en compagnie de Samuel, quebecois, et Stephan, allemand. Pourquoi Julie est-elle la seule fille? Elle commence deja a douter. Arrives au premier refuge a 4750 m, il fait un froid de canard et on n'y voit pas a 2 metres. Mais qu'est-ce qui nous a pris de venir ici pendant la saison des pluies?? L'apres-midi est consacre a l'entrainement sur le glacier avec tout l'equipement, crampons, piolet, etc. Mais rien que pendant la petite marche d'approche, on sent bien l'altitude. Julie est essoufflee tous les 3 metres et se sent tres tres faible (qui se traduit par "debil" en espagnol, elle aime bien dire au guide que la elle se sent un petit peu debile!). Pour les efforts sur le glacier, c'est la meme chose. Beaucoup plus difficile qu'en Argentine du fait de l'altitude. Nous sommes a 4850 m, plus haut que le Mont-Blanc (mais comment ca on n'a monte que 100 m depuis le refuge?! impossible) et notre coeur s'emballe a chaque coup de piolet. On experimente toutes les techniques de marche, en avant, en arriere, en canard, de cote, de l'autre cote, comment planter les crampons, bref, c'est technique. Et la nous ne sommes pas encore encordes. Julie doute de plus en plus.

Apres 2 h d'entrainement, nous sommes ravis de retourner au refuge pour un petit the de coca. On espere que ca va nous aider. Surtout Jerome qui a une angine et de la fievre. Apres un copieux repas, nous brulons tout le stock de bois amene de La Paz. Ca fait du bien une chaleur qui depasse les 5 degres. Quand il n'y a plus de bois, on file au lit tout habilles. Ca promet pour la nuit suivante a 5300 m.

Au reveil, il fait un temps splendide. Voila qui nous met en joie pour la premiere ascension qui n'est pas prevue avant le debut de l'apres-midi. En decouvrant enfin la montagne en question, Julie n'est pas trop sure d'y arriver et elle se demande encore pourquoi elle s'est embarquee dans cette aventure. C'est haut quand meme.

Apres le dejeuner, nous embarquons sacs et crampons, il pleut. On n'aurait pas pu partir le matin? En chemin nous voyons un magnifique condor planer en-dessous de nous. La montee est moins difficile que ce qu'on imaginait, mais on doit quand meme s'arreter assez regulierement pour respirer. Julie a grave la patate.
Nous arrivons en un peu plus de trois heures au camp de base. Programme : une soupe et au lit, a 18h. On doit se lever a minuit pour debuter l'ascension a 1h a la lampe frontale. Pas facile de dormir saucissonnes a six dans un bunker de 4m sur 4 a 5300 m. Julie a de plus en plus mal a la tete, qu'elle attribue au matelas dans un premier temps. A minuit, bip bip bip, c'est l'heure d'enfiler les crampons. Au moment du reveil, quand elle vomit pour la premiere fois, Julie se rend compte qu'elle souffre du mal de l'altitude, le soroche. Rien n'y fait, la montagne a gagne.

Jerome lui a bien la peche meme si il tousse toujours. Les trois mecs sont prets, oups, Jerome casse une laniere de ses crampons. Stephan et Samuel partent deja avec leur guide. Apres une reparation de fortune avec un lacet de Julie, Jerome est enfin pret pour attaquer la phase finale du Huayna-Potosi en compagnie de Benicio. Encordes, encrampones et sous une tempete de neige, c'est parti pour 5h d'escalade. Apres 2h d'ascension, ils ratrappent Stephan et Samuel.

C'etait une erreur, Jerome est deja bien fatigue. Le groupe de tete reprend la route tandis que Jerome reprend un peu des forces. C'est de plus en plus difficile. Un pas puis un autre puis encore un autre et le coeur se met a battre a 180, le souffle manque! Une petite pause avant d'escalader a nouveau et le meme rythme a nouveau. Un pas, un autre, et ... une petite pause. Jerome imagine que ca doit etre ca d'avoir 90 ans.

D'apres Benicio, nous devrions encore marche 40min a plat et ensuite attaquer la cumbre, le sommet. A ce moment, dans le tete de Jerome, mille idees s'entrechoquent. J'ai mal a la tete, c'est peut-etre le debut d'une rupture d'anevrisme, je n'arrive pas a respirer, c'est peut-etre un oeudeme pulmonaire ?... Benico, je n'ai plus d'energie, la coca que je mache depuis ce matin me seche la gorge. Je sais qu'en montagne, le sommet, c'est la moitie, il faut ensuite redescendre. Jerome, un poquito mas. Ok Benicio. Jerome passe devant et apres 1h00 de calvaire, trouve un n'ieme souffle qui lui permet d'atteindre la crete a 6088m. Il y deroule la banderole qu'il a passe 4 heures a coudre a La Paz. Il a failli y laisser un petit doigt qu'il ne fait pas bon de sortir sous ces temperatures de -20 degres ! Difficile de prendre des photos de ce spectacle incroyable mais les images resteront a jamais gravees dans sa memoire.
Pendant que Julie vomit sous la puree de pois, Les lumieres de La Paz font doucement place aux doux rayons du soleil. Il faut maintenant redescendre. C'est bien plus impressionnant qu'a la montee car la, on voit bien les precipices, les crevasses. On profite un peu de la descente pour prendre quelques photos et faire un peu de rappel. Ca, Jerome aime bien meme si il est lessive. Arrivee au camp de base, la petite troupe recupere Julie pour entamer la descente finale.
Julie se sent tout de suite mieux lorsque on arrive a 4750m.

Tout est bien qui finit bien.

Apres toutes ces emotions on se rejouit d'aller dans la jungle amazonienne, au chaud et a 350 m d'altitude, voila qui devrait nous remettre sur pied.

mardi 10 février 2009

Entre sel et cieux



Apres une heure de bus en ligne droite le long du volcan Licancabur, nous voila au poste frontiere avec la Bolivie ou nous attendent nos superbes jeeps Toyota. Nous effectuons les formalites administratives a plus de 4000 m d'altitude, il est 9h et nos chauffeurs-guides boliviens nous attendent devant un joli petit-dejeuner. Ca commence bien, tres bien.

Nous rencontrons nos compagnons de voyage, un couple de francais (encore!) Gregory et Fanny, et un couple de chiliens, Javier et Maria Paz. Notre chauffeur Epiphanio, est un type super sympa et serviable. Il a tout de suite compris que Jerome etait le fou de la gachette photo. Il fait halte a chaque demande.

Nous partons pour les lagunes de l'altiplano. Nous debutons par la laguna Verde qui n'etait pas tres verte mais d'un calme olympien qui permettait au Licancabur de s'y refleter. Une vision irrelle sur fond de ciel bleu. Apres un certain moment le vent s'est leve et le lac entier est devenu vert turquoise !

Nous poursuivons ensuite sur el Desierto de Salvador Dalí, le Salar de Chalviri, las Aguas Termales de Polqueses, la Pampa Siloli et el árbol de Piedra. C'est incroyable, des paysages et une altitude a vous couper le souffle. Nous faisons etape dans un refuge sympa. Jerome, l'hyperactif, part pour une ballade dans un petit canyon en amont. Il y croise plein d'oiseaux. Il faut dire que tout le monde est assez fatigue car nous sommes a 4850m d'altitude.

Le lendemain matin, nous partons pour la Laguna Colorada, ou nous contemplons a nouveau une plethore de flamands roses. La Laguna Honda, la Laguna Cañapa ou la Laguna Colorada ne sont que toutes plus belles les unes que les autres.

Le soir nous arrivons aux abords du Salar d'Uyuni et nous prenons nos quartiers dans un hotel de sel, entierement de sel. Les murs, le sol, les lits, les tables et chaises, tout est en sel. On nous avait dit que l'on dormirait dans un hotel de sel mais la, nous avons ete bluffes.

4h45, le reveil sonne. C'est l'heure de partir pour le Salar au lever du soleil. Il n'y a que nous et des le lever du soleil, nous admirons nos ombres s'etaler sur une dizaine de metres dans cette immensite de sel. Nous retournons tout eblouis a l'hotel de sel pour prendre le petit-dejeuner.
Apres avoir roule plusieurs dizaines de kilometres sur cette etendue saline, nous arrivons sur l'Ile Incahuasi ou nous pouvons a nouveau admirer des cactus candelabres de plus de 10m de haut et donc plus que millenaires.

Apres une seance de photos rigolotes, nous dejeunons dans le petit village de Colchani. La, le change nous est tout de suite donne. Nous patientons pour notre dejeuner dans la rue et la, une mamie, descend du bus, le contourne et, sans aucune gene, fait pipi devant nous. C'est la facon la plus rapide de rentrer dans le vif du sujet. Et nous comprenons tout de suite que nous allons avoir un probleme de toilettes publiques, ca n'existe pas. Il faut se trouver un petit coin dans la rue.
On se rend vite compte que nous sommes dans un autre pays. La premiere chose qui nous interpelle apres la mamie, c'est la pauvrete. C'est un autre monde dont nous venons d'ouvrir la porte. Rien a voir avec le Chili ou l'Argentine.

Nous ne tardons pas trop a Uyuni qui n'est pas une ville tres interessante. Nous partons donc pour Sucre en compagnie de nos amis Chiliens, Maria Paz et Javier. Sucre est une ville tres agreable avec une architecture coloniale bien entretenue. C'est bientot le carnaval et les jeunes, a cette occasion, se lancent des bombes a eau. Parfois, les touristes ne sont pas epargnes, dixit Julie.

De Sucre, nous nous rendons pour la journee au marche de Tarabuco ou se vendent tous les objets artisanaux de la region. C'est un marche haut en couleurs ou les vendeurs sont encore vetis de leurs habits traditionnels. C'est un marche touristique qui reste encore authentique. La encore un fois, on se rend compte de l'immense pauvrete dans laquelle se trouve ce pays. 60 % de la population vit en dessous du seuil de pauvrete. Alors que nous dejeunons sur une petite terrasse pres du marche, un vendeur ambulant nous demande si il peut terminer nos assiettes. Il n'y avait que les os a rogner, et il a insiste. C'est triste.

De Sucre, nous decidons de faire une petite incursion au parc National de Lauca au Chili. Nous prenons deux bus a la suite pour un total de 19h et nous voila a Putre, enfin sur la nationale a 5km de Putre, ville depart pour le parc de Lauca. Deux personnes nous prennent en stop. Cela nous evite de marcher 5km sous une pluie battante.

Nous consacrons notre journee suivante a la visite du parc national de Lauca ou nous pouvons voir une quantite astronomique de vigognes, viscaches, lamas et alpagas. Malheureusement le soleil n'est pas au rendez-vous et nous ne pouvons pas admirer les magnifiques volcans Parinacota et Sajama.

Etape suivante, la Paz, capitale la plus elevee au monde perchee a 3660m. Nous devons sejourner deux jours a la Paz pour nous acclimater un peu plus avant les hautes cimes du Huayna Potosi qui culmine a 6088m d'altitude, notre prochain defi.

mardi 3 février 2009

Altiplano


Apres plus de 100 heures passees dans les bus, si confortables soient-ils dans ce pays, nous avons decide de prendre les airs pour couvrir les quelques 3000 km qui separent Puerto Montt de San Pedro de Atacama. Nous ne sommes pas fiers, mais il faut dire qu'une journee de voyage au lieu de trois nous a grandement facilite la vie.

Nous sommes donc arrives frais comme des gardons a San Pedro de Atacama, charmant petit village en terre perdu dans une oasis au milieu du desert le plus aride du monde. La derniere pluie remonte a janvier, 2008.

Dans l'altiplano andin, a 2400m au pied de montagnes et de volcans qui culminent a 5000m, nous partons explorer les paysages surrealistes qui nous entourent.

D'abord le Salar d'Atacama que nous decouvrons au lever du soleil avec ses flamants roses. Quel spectacle que cette epaisse croute de sel irreguliere ponctuee de lacs parfaitement plats qui refletent le paysage volcanique au lever du jour comme un miroir.

Puis les lacs Miscanti et Miñique tous deux situes a environ 4300m d'altitude. Un vrai decor de carte postale. Au pied de volcans encore plus hauts, les vigognes paissent au bord de lacs brillants. Les couleurs sont intenses, le bleu profond du ciel, le jaune paille des touffes seches, le vert tendre des plantes qui bordent le lac, le blanc du sel. En pleine contemplation, on peut a peine parler. Surtout Jerome qui tente le 100m afin de verifier qu'il est assez en forme pour braver les sommets boliviens! Il a tire la langue, mais ne se decourage pas pour la suite.

Le lendemain nous nous levons a 3h du matin pour decouvrir les Geysers du Tatio au lever du soleil. Il fait froid, tres froid. -6 degres dehors, et presque si froid dans le bus. L'interieur des vitres a gele, tout comme nos orteils.

Nous sommes a nouveau a 4300m d'altitude, c'est bon pour l'acclimatation et les globules rouges.
C'est un site comptant une soixantaine de petits geysers bouillonnants. C'etait plus des jets de 2-3 metres que de 10, mais un joli spectacle tout de meme. Rien a voir avec le jet d'eau.

Sur le chemin du retour, nous nous arretons dans un petit village ou nous pouvons gouter pour la permiere fois un bout de brochette de lama. Il est 10h, pas mal.

Un des points forts de l'excursion sera tout de meme la foret des cactus. Nous longeons une riviere dans un canyon dont les flancs sont ornes de ces geants epineux, cactus candelabres ou "cardon" en espagnol. L'evocation de ce nom nous fait encore saliver des gratins qu'on a rates a Noel. Nous avons donc marche au milieu des cardons, c'est meilleur pour la ligne.

Notre ultime visite, la vallee de la Lune. Dans un decor reellement lunaire, nous devalons les dunes en courant comme des momes, marchons sur le lit d'un lac millenaire, nous promenons dans un canyon de gypse cristallise et de sel, et terminons notre course en haut d'un petit mont au coucher du soleil. Il ne manquait que l'apero.

En parlant de Lune, nous avons profite des conditions exceptionnelles du ciel d'Atacama pour l'observer de plus pres. Un astronome francais s'est installe la et fait partager sa passion aux visiteurs. Avec ses sept telescopes, nous avons meme pu admire Saturne et ses anneaux. Inutile de dire que nous avons ete emerveilles comme des enfants. C'est beau de se sentir jeunes.

Nous nous preparons a quitter le Chili pour la Bolivie. Nous partons en expedition Land Cruiser (c'est ce qu'ils ont dit a l'agence) pour le Salar d'Uyuni, on n'a meme pas peur, on a survecu aux vieux minibus russes.

Nos vemos.